Rédigé par René Ricardo Bernal.

Dans le cadre de l’édition 2017 du Festival MURAL, Kevin Ledo, une célébrité montréalaise à part entière, a créé un portrait colossal de Leonard Cohen qui a fait la Une partout à travers le monde. En tant qu’artiste contemporain établi, Kevin a voyagé aux quatre coins de la planète pour créer des murales et présenter ses oeuvres en galerie.

Notre équipe a rencontré l’artiste dans son studio, situé au 2e étage de la Galerie Livart à Montréal. On a alors eu la chance de discuter de son parcours en tant qu’artiste, de ses inspirations et de son point de vue par rapport au mélange de styles d’art traditionnels et urbains.

Peux-tu nous en dire plus sur ton parcours en tant qu’artiste?

Dès un très jeune âge, j’ai toujours eu de l’intérêt pour l’art, en commençant par le style des peintures de Bob Ross à l’âge de 12 ans. J’ai toujours su que je voulais explorer cet intérêt pour l’art.

Plus tard, j’ai étudié le design d’illustration au Collège Dawson. Après ma graduation, j’ai eu plusieurs emplois surprenants tout en continuant à peindre à temps partiel jusqu’à ce que je déménage à Taiwan pour enseigner l’Anglais. C’est à ce moment que j’ai décidé de me concentrer sur mon art et j’ai travaillé pour que celui-ci soit exposé en galerie.

Puis, en 2004, je suis retourné à Vancouver pour peindre des toiles. Après un an au Canada, j’ai déménagé à nouveau à Montréal pour continuer à travailler sur mon art jusqu’à ce que ça devienne mon emploi principal à temps plein en 2009.

J’ai seulement commencé à faire des murales il y a 5 ans. À la suite d’une exposition décevante à Vancouver, je suis allé en Amérique centrale pendant 7 mois, où j’ai peint ma toute première murale dans le restaurant d’un ami. Ça m’a ouvert la porte à deux autres projets de murales. Dès que je les ai fini, d’autres opportunités se sont présentées à moi et ça m’a éventuellement amené à Sao Paulo pour un graffiti jam. Avant de m’en rendre compte, j’avais déjà complété six murales à l’intérieur de six semaines.

Qui sont les artistes qui t’ont inspiré?

Je suis influencé et inspiré par de nombreux artistes, mais la majorité de mon inspiration vient de mouvements artistiques ou de différentes périodes artistiques.

 

Le symbolisme et les couleurs dorées de l’iconographie chrétienne et de l’iconographie religieuse en générale, m’inspire beaucoup, par exemple.

 

Je m’inspire aussi de la période cubiste analytique par Braque et Picasso avec leur rupture de la forme, leurs couleurs terreuses et leurs compositions d’images éclatées.

 

Une autre source d’inspiration pour moi serait Chuck Close et son hyperréalisme.

 

Mais, plus spécialement, Alphonse Mucha, l’illustrateur Art Nouveau, a été un point de départ pour moi. C’est celui qui a le plus influencé mon travail en tant qu’artiste. Il y a beaucoup de géométrie et de flux organiques auxquels je simplifie les lignes vectorielles.

Ton art est un mélange de portraits humains photoréalistiques et d’abstraction géométrique. Comment ce concept a-t-il pris forme?

L’abstraction géométrique est plus vague et j’aime la mélanger aux émotions expressives de portraits humains. Je trouve que c’est un bon moyen d’évoquer des idées que je suis encore en train d’explorer, en ne donnant pas de détails précis. J’aime l’idée que les formes peuvent représenter des choses que le public ne comprends pas.

 

J’ai toujours eu un grand intérêt pour la psychologie et la métaphysique, je nous vois apprendre en tant qu’espèce. Je dirais que c’est un clin d’oeil à l’idée qu’il y aurait plus à découvrir sur nous-mêmes que nous le pensons.

Peux-tu nous en dire plus sur ta démarche artistique et sur les différentes étapes par lesquelles tu passes lorsque tu crées une oeuvre?

Ça dépend du type d’oeuvre que je crée. Avec les murales, ça a beaucoup à voir avec l’endroit où je les peint et le public qui la verra quotidiennement. Lorsque je fais des portraits, j’aime en savoir plus sur l’histoire et j’essaie de choisir quelqu’un de local ou quelqu’un qui peut bien représenter les alentours. J’essaie d’amener un angle socio-politique à mon art, comme une célébration du multiculturalisme et de la diversité.

 

En studio, je travaille plus de manière spontanée. Ma première série d’oeuvres était basée sur l’iconographie chrétienne, où à la place de saints, je représentais des mannequins. Cette série avait une intention, mais, depuis, je crée davantage selon comment je me sens sur le moment et selon mes intérêts.

Ton travail te permet de voyager beaucoup comment les différentes cultures influencent ton travail? Essaie-tu toujours de faire le portrait de gens dans leur “habitat naturel”?

Je n’ai pas de règle stricte sur qui je choisis de faire le portrait à chaque endroit que je visite, mais j’essaie le plus possible de peindre quelqu’un de local. Pour moi, c’est plus à propos de l’énergie de l’oeuvre et l’idée de créer quelque chose auquel le public pourra s’identifier. D’autant plus que lorsque je quitte, c’est eux qui vivront avec mon oeuvre tous les jours.

Y a-t-il des projets sur lesquels tu travailles en ce moment dont tu pourrais nous parler?

À la fin du mois de novembre, je prévois aller à Miami pour Art Basel et je suis aussi en pleines discussions pour d’autres projets potentiels. Mais, majoritairement, durant l’hiver, je reste à Montréal pour peindre dans mon studio. J’ai récemment commencé un projet où j’explore l’impressionnisme abstrait. Je serai alors moins concerné par les portraits et je me concentrerai davantage sur l’abstrait, ce qui finira par influencer mon travail principal.